Lundi
Tiens, j’écrirais bien un nouvel article. J’aime bien écrire des articles, c’est vraiment un moment agréable, tranquille devant mon ordi, à enrouler les mots, à les faire sonner, résonner, tout en regardant le soleil jouer à travers les feuilles des arbres que j’aperçois par la fenêtre. Ils ont drôlement poussé les arbres. Faudrait que je les taille. Mais ils sont hauts. Peut-être qu’avec un échenilloir ça serait plus facile. Je me demande combien ça coûte. Tiens, je vais regarder sur le site de Leroy Merlin (ou Castorama ou Bricorama). Un peu moins de 100€ perche comprise. Ah moins que je ne demande à quelqu’un de venir ? Pages jaunes ? Allô voisin ? Je vais jeter un œil. A-L-L-O. Ah, Allo Resto m’affiche Google. C’est vrai, tiens, je vais faire quoi à manger ce soir ? Du poulet ? Je n’en ai plus assez je crois. Attends je vais voir dans le frigo. Oui, c’est bien ce que je pensais, plus assez. Au moins j’ai pu prendre un morceau de chocolat au passage… Une salade ? Les enfants vont faire la tête. Une quiche ? Oui, pas mal. A quoi ? Voyons Marmiton. Lorraine. Au thon. Aux courgettes. Aux champignons. Au saumon… Mince, il est déjà 19h, ce n’est plus la peine que je m’y mette à cet article, à 19h30 faudra que je me mette à la cuisine. Tant pis, on verra demain. J’ai quoi demain ? Mon ami iCal, dis-moi. Un rendez-vous le matin, rien l’après-midi, super, j’écrirai à ce moment-là, j’aurai au moins 3h avant la sortie de l’école, pas la peine que je m’excite ce soir…

Mardi
Voilà, l’ordi est prêt, moi aussi, je me suis fait un café, il est 13h30, j’ai 3h30 devant moi. Bon, avant de commencer à écrire, je vais boire mon café tranquille en jouant à un petit jeu, ça me mettra en conditions. Candy crush saga. Niveau 1903. Pas mal ! C’est rien, Candy crush saga, on n’a que 5 vies (pas question de bidouiller la date système, je vous l’ai déjà dit, non, que ma valeur n°1 c’était l’honnêteté ? Même vis à vis d’un processeur, non mais), et chaque partie ne dure qu’une ou deux minutes. Bon, d’accord, un jour j’essayerai de chronométrer combien de temps j’y passe par jour. Pas beaucoup, je suis sûre ! Quoi, qui a dit « mon œil ? ». Allez, bonbons rouges, bonbons bleus, explosion, zut, j’ai perdu. Encore une petite partie. Mince, j’ai déjà fini mon café. J’ai encore un peu faim. Peut-être un petit bout de pain. Ou un carré de chocolat. Bon, l’article. J’avais plusieurs idées de sujet. Voyons cela. En fait, ça serait peut-être mieux que je fasse le compte-rendu du rendez-vous de ce matin avant, comme ça, ça serait fait. Allez, je m’y mets. Bon, ce n’est pas très intéressant, mais faut bien le faire. L’article, c’est juste pour le plaisir. Et le travail passe avant le plaisir. Je sais, y aurait un coach dans le coin, il me dirait l’air de rien « qui c’est qui dit ça ? ». Pfff, croyances, croyances… Tap tap tap, voilà, compte-rendu terminé. Je relis, j’envoie. J’ai bien mérité une petite pause. Je me ferais bien un thé. Allez, c’est vendu. Et puis ma montre n’arrête pas de couiner en me disant « Levez-vous », je ne peux pas désobéir à ma montre tout de même. Allez, me revoilà. 16h30. Quoi, déjà ? Faut que je parte à l’école dans 1/2h, plus la peine de commencer cet article. Bah, je verrai ce soir… A moins que je ne regarde un truc à la télé. Ce n’est pas Grey’s anatomy ce soir ? Même sans le docteur Mamour, ça reste pas mal…

Mercredi
Bon, j’ai déjà fait deux allers-retours à l’école. Un petit café et je m’y mets. Qui dit café dit détente, qui dit détente dit… Candy crush saga ! Juste un peu. Quelques bonbons, quelques meringues, deux ou trois gélatines… Oh, mais j’y pense, cet aprem, fifille va à la gym. Faut que je regarde si j’ai bien lavé et repassé ses affaires. Ah oui, c’est bon. Mais ils mangent tous les trois à la maison à midi, mince, je vais leur faire quoi ? Bon, je verrai à 11h, pour l’instant l’article. Zut, je n’ai toujours pas choisi le sujet. Il y a tellement de choses passionnantes dans le milieu du développement personnel ! Je me demande d’ailleurs s’il n’y aurait pas quelques nouveaux bouquins qui seraient sortis. Tiens, je vais jeter un œil. Psychothérapies. TCC. EFT. Ah oui, EFT, j’avais reçu un livre blanc il y a quelques semaines. Je ne l’ai pas encore lu. Mince, où je l’ai mis ? Ah le voilà. Voyons. Ah oui, ça a l’air très intéressant. Mmmmm… Bon, je le terminerai un autre jour. Quoi, plus que 20 minutes avant 11h ? Bon, je vais lire mes mails… Et puis on verra demain, parce que cet aprem, j’ai un peu beaucoup de choses à faire.

Jeudi
Oh la la, je dois absolument faire ma compta et ma déclaration de tva aujourd’hui, c’est la dernière limite. Et j’ai des rendez-vous. Je sens que c’est mal barré pour écrire cet article. Ça commence à me saouler, j’aime bien écrire des articles, zut ! Bon, au moins la compta c’est tranquille, pas besoin de réfléchir beaucoup, et puis au moins j’aurai l’impression d’avoir fait quelque chose. Et puis je n’ai pas le choix. Allez, on verra demain…

Vendredi
Bon, le café est bu, ce coup-ci je ne me laisse pas distraire. L’article. Il faut que je choisisse mon sujet déjà. Je me demande si ça ne serait pas une bonne idée d’écrire quelque chose sur……… la procrastination. Remettre au lendemain. J’ai bien l’impression que j’ai un petit côté procrastineur… ou procrastinateur. Je ne sais pas quel est le bon mot. Et Word n’aime ni l’un ni l’autre. Google ! Ah ben, Google trouve les deux. Enfin, on dirait bien que c’est procrastinateur quand même. Allez, je lève mes fesses et j’attrape un vrai bon gros dictionnaire en papier ! Que dalle. Bon, c’est vrai qu’il n’est pas jeune mon bon vieux Robert… Tiens ça me fait penser à Robert Redford. Comment il s’appelait ce film, déjà ? NON !!! On se concentre. Procrastinateur. C’est que j’en connais des trucs pour lutter contre… Une histoire de cailloux… Une histoire de tomate… De singe et d’éléphant aussi… Oh, mais j’y pense, vous avez vu cette vidéo formidable de Tim Urban sur le sujet ? Une prestation génialissime qu’il a faite pendant les conférences TED. Vous connaissez les conférences TED ? Oui ? Tant mieux. Non ? Oui, et ben vous irez voir plus tard. Vous voulez le lien de la conférence ? Si je le mets, vous reviendrez lire la suite ? Non, parce que ça pourrait vous donner l’idée d’aller voir autre chose qui vous donnerait l’idée d’aller voir autre chose qui vous donnerait… Allez, je vous le mets en bas, un petit coup de roulette à souris, d’ascenseur ou un glissement de doigts furtif sur le trackpad et vous y serez…

Revenus ? Merci ! Alors il nous dit quoi, le Tim ? Qu’on a dans le cerveau un gars raisonnable qui barre le bateau, maintient le cap et a la vision de ce qu’il faut faire. Il organise les tâches, il fait les plans, il sait où il faut aller et comment. Tant qu’il est au gouvernail, tout va bien, notre bateau avance droit, les cases de notre to do list se cochent. Mais dans notre tête habite également un petit singe. Mignon, sympa, lui ce qui l’intéresse c’est la gratification immédiate. Se faire plaisir là tout de suite, maintenant. Alors il prend les commandes (du bateau, pas les commandes de pizzas, pff), et nous conduit vers toutes ces sources de satisfaction qui sont juste à portée de main, qui ne demandent aucun effort : la boîte mail, la boîte de bonbons, la boîte à images, la boîte à musique, la boîte à coucou, le coup de fil à un ami, le coup de filet dans le frigo, la visite à un autre ami, surtout celui qui s’appelle Google, la chaise-longue, les baskets, le canapé, que sais-je encore… Et tant qu’il est aux commandes, plus d’espoir pour notre commandant de bord, le bateau dévie, tangue, roule et le planning dérive…

Bon, c’est sympa cette histoire de singe, mais concrètement, on fait quoi pour ne plus procrastiner ?

Certes, on peut compter sur la pression de la dead line et se dire que comme souvent, on aura un coup de fouet (ou de pied au cul, ou les deux) quelques jours avant l’échéance. Mais, et d’un ce n’est pas très confortable, voire pas confortable du tout, parce que le barreur il est là, il regarde le singe faire le couillon et il râle, et de deux, les études montrent que quand on travaille sous pression les erreurs augmentent, et de trois, ya pas forcément de dead line. Genre si je me dis que je veux publier un article sur mon blog. Personne va venir râler parce que je ne l’ai pas fait, personne n’a dit que je devais en publier un par semaine ou par mois, personne ne va venir me le mettre ce coup de pied aux fesses. Enfin, quoique… j’ai bien remarqué que Facebook ronchonnait si on n’écrivait pas assez souvent. Mais un coup de pied de Facebook, ça n’est pas très douloureux…

Alors, concrètement ? Trois petites histoires : une de cailloux, une d’éléphant et une de tomate.

Une histoire de cailloux
Je vous la fais courte, si vous voulez la version longue, pas de doute que vous saurez la trouver. Mais pas tout de suite, on reste focus !!! Il était une fois (bon, ça c’est pas dans la version officielle) un professeur qui devait donner un cours sur la gestion du temps à des tronches en management, et il n’avait pas beaucoup de temps pour le faire. Alors il a sorti un gros bocal en verre et y a placé quelques gros cailloux, genre galets ou balles de tennis. Et il a demandé aux super managers si le bocal était plein. Ben oui qu’ils ont dit. Et paf, le professeur sort des petits graviers de sa poche et les verse dans le bocal où ils se répartissent tranquilles entre les gros cailloux. Et là, il est plein mon bocal ? Chat échaudé craignant l’eau froide et manager top niveau ne voulant pas passer pour un con devant tout le monde, la réponse fut non. Et notre prof sort du sable de son chapeau et rebelote, le verse dans le bocal. Et là, c’est plein ? Ah ben non, on ne nous la fait pas ! Exact, trop forts les cadors en management ! Et notre prof de verser de l’eau jusqu’à ras bord. Alors vous avez appris quoi, chers brillants étudiants ? Et ben, que quand l’agenda est plein, on peut le remplir encore et encore ! Pfff, mais non, pôv nigauds de managers de mes deux, que nenni ! Ce que ça vous apprend, c’est que si vous n’aviez pas mis les gros cailloux en premier, et ben vous n’auriez jamais pu mettre le reste ! Donc, avant d’attaquer sa journée (sa semaine, son mois, son année), on décide quels sont les gros cailloux à caser absolument, on les planifie et on les garde bien en tête. Et le sable et les graviers que charrient notamment les outils digitaux, l’eau que l’on cherche pour remplir son estomac ou apaiser son ennui, ben on ne les met qu’après. Ou pas.

Une histoire d’éléphant
Bon, donc on sait ce qu’on doit accomplir dans la journée. N’empêche, faut le faire. Et il faut être en bonnes conditions pour le faire. On admet communément que le cerveau est composé de trois parties (quoique, hein, ça se discute, mais là présentement, ce n’est pas bien important, et puis trois c’est impair et je préfère les chiffres impairs) : le cerveau reptilien qui est genre instinctif, le cerveau limbique où les émotions s’en donnent à cœur joie et le néocortex qui est le rationnel de l’histoire. Voilà l’histoire donc. Il était une fois un cornac (le neocortex) qui était monté sur son éléphant (le cerveau limbique). Le cornac sait où il veut aller, il dirige son éléphant, peinard. Enfin, peinard, façon de parler, parce que ça lui demande de l’énergie de diriger son éléphant. Alors au bout d’un moment, il commence à piquer du nez. Et l’éléphant, il le sent bien. Alors il commence à aller à droite regarder un truc sur Facebook, à gauche chercher un morceau de fromage à manger (euh, ça mange du fromage les éléphants ?) et notre cornac se laisse balloter, et au final, la journée s’achève et il n’est pas du tout arrivé à l’endroit prévu. Alors il faut faire quoi ? Donner de l’énergie à notre cornac pour qu’il ne pique pas du nez ! C’est à dire dormir suffisamment, faire de l’exercice physique, prendre l’air, manger des bonnes choses (bonnes pour la santé, hein, pas bonnes parce que pleines de sucre ou de crème), méditer, …
Bon, voilà, on a rechargé les batteries, avec ça le cornac est en forme. Il peut reprendre son chemin. Mais voilà que, paf, ya un truc au milieu de la piste qui fait peur à l’éléphant. Un obstacle qui lui paraît si haut, si infranchissable qu’il ne veut plus avancer d’un pouce. Et notre cornac regonflé à bloc, il n’y peut rien, pas moyen que l’éléphant passe au-dessus de ce fichu obstacle. Et pas moyen de le contourner non plus. Pourtant il pourrait passer au-dessus l’éléphant, il a les pattes assez grandes, les muscles assez forts. Mais pas moyen, il reste tanqué. Alors notre cornac, il descend, et il place devant l’éléphant le même obstacle, mais très bas, et il fait passer l’éléphant, une fois, deux fois, dix fois. Et il monte un petit peu l’obstacle et c’est reparti pour une fois, deux fois, dix fois. Et ainsi de suite jusqu’à ce que l’éléphant n’ait plus peur de franchir l’obstacle initial et y parvienne. Alors, comme lui, face à un obstacle qui vous fait peur (parler en public, animer une réunion, tourner une vidéo, écrire un article, exposer vos idées, …), au lieu de remettre à plus tard, entrainez-vous sur quelque chose de moins engageant pour vous. Et pas qu’une fois, encore et encore jusqu’à ce que ça devienne cool pour vous, et montez un peu le niveau de temps en temps. Qui a dit que son premier concert, il fallait le faire au stade de France ?

Une histoire de tomate
D’accord, on progresse, on sait comment choisir les tâches à faire, on sait comment être en forme pour les accomplir, on sait comment surmonter son aversion émotionnelle (c’est ça le nom savant pour l’éléphant qui a peur de l’obstacle, la classe, non ?). Mais là maintenant tout de suite, je fais quoi ? Et ben je prends une tomate. Pas une vraie. Enfin, si, si vous voulez consommer là tout de suite un de vos 5 fruits et légumes par jour, mais attention au jus. Non, un minuteur en forme de tomate. Vous désactivez le Wifi, vous mettez le téléphone en mode avion et vous réglez le minuteur sur 25 minutes. Et pendant 25 minutes, vous restez focus sur la tâche que vous vous êtes fixé. Bon, si le tic tac ça vous agace, vous pouvez aussi utiliser le minuteur de votre téléphone. Si, si, même en mode avion, ça marche. Allez, on reste concentré. Et au bout des 25 minutes, 5 minutes de pause bien méritée ! On se lève, on marche un peu, on ouvre la fenêtre pour respirer, et même, si on a été très sage, on regarde un ou deux mails. Ou la dernière robe de Lady Gaga. Ou on mange un bonbon Kréma (parce que ça rime). 5 minutes, c’est tout ! Et on s’y remet. 25 minutes. Et 5 minutes. Et encore. Et au bout de 4 tranches de 25 minutes, c’est la grande pause ! Un quart d’heure ou 20 minutes. Tic tac tic tac… Super efficace ! Bon, pour les réfractaires à la tomate et les geeks, il y a plein d’applis qui gèrent le temps pour vous, avec si vous voulez des bruits de fond, la pluie, la mer, la forêt. Le nom de cette méthode c’est « pomodoro » (ben oui, ça veut dire tomate en italien, incredible isn’t it ?). Un petit tour dans le store, vous allez trouver votre bonheur…

Bon, alors voilà, il me reste 4 minutes dans ma troisième tomate pour vous dire, non pas que l’Ovomaltine c’est de la dynamique, mais que vous voilà dotés de quelques armes pour lutter contre la procrastination. Reste à utiliser, parce qu’une fois encore c’est en forgeant qu’on devient forgeron, c’est en cornaquant qu’on parvient à conduire l’éléphant, c’est en tomatant qu’on passe à l’action et c’est en y croyant qu’on laisse au loin la procrastination. Alors, vous faites quoi dans la prochaine tomate ?

Belle journée à vous et à bientôt !

 

Conférence de Tim urban : https://www.youtube.com/watch?v=TUvijOgHptQ

 

© Copyright Isabelle Roche – 2017 – Tous droits réservés
Le texte de cet article est la propriété de son auteur et ne peut être utilisé sans son accord et sous certaines conditions.

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