Le premier janvier de cette année, j’étais sur la côte atlantique, en Bretagne. Le ciel était plutôt dégagé, il y avait un vent de fou. Je suis comme souvent allée marcher sur les rochers. La marée était basse, j’ai pu avancer loin et me poster face au vent, bien campée sur mes pieds. J’inspirais à pleins poumons l’air marin. Et, tandis que je parcourais des yeux ce paysage familier et pourtant toujours différent, les mots sont venus. Un rythme les accompagnait. Je suis restée un moment à les écouter, j’ai commencé à les noter et puis je suis rentrée. Ainsi est né le slam de la nouvelle année.

Pas un bruit ce matin, silence de jour férié,
Bon sang, mais c’est bien sûr, on est le 1er janvier !
J’ôte le calendrier, lourd de l’année passée.
Il laisse place au nouveau, impatient, tout léger.

Sortir la tasse, faire chauffer l’eau, griller du pain,
L’odeur me comble d’aise et me donne de l’entrain.
Elle est loin la fatigue des fêtes d’autrefois,
Veillée avec Stéphane Bern, lui, le canap’ et moi.

 

Janvier, février… Je laisse mon esprit vagabonder…
De quoi sera-t-elle faite, cette nouvelle année ?

 

Je m’assieds tranquillement et réveille mon ordi
Pour voir comment le monde a traversé la nuit.
Les notifications pleuvent depuis la messagerie,
Mon cœur bondit de joie, plein de mots des amis !

Je parcours rapidement la boîte de réception.
Pas d’amis, que des pubs, bonjour la déception.
À coups de mots choisis, elles ont un but précis,
Faire de 2025 la plus belle année de ma vie.

 

Mars, avril… Marketing digital, injonctions de toutes sortes,
De cela sera-t-il fait, l’an qui frappe à ma porte ?

 

Certains messages promettent une santé parfaite :
Maîtriser son assiette, respecter la planète,
Faire du sport souvent, marcher, courir, nager,
Sur ses heures de sommeil, ne jamais transiger.

Viennent ensuite tous ceux traitant de réussite :
Quitter son vieux boulot, depuis l’temps qu’on hésite,
Monter une entreprise ou bien un side business,
Vivre de sa passion, en prime remplir les caisses.

 

Mai, juin… Vivre différemment, prendre un autre chemin.
Cette nouvelle année changera-t-elle mon destin ?

 

Puis s’avance la cohorte des messages pour l’esprit.
Stages de respiration pour inspirer la vie,
Hypnose, sophro, coaching pour gommer ses soucis,
Et même voir l’avenir dans la cartomancie.

Le temps file, télé allumée, déjà l’heure du JT,
Descendre une station plus tôt, monter les escaliers…
Las ! D’année en année, les mêmes marronniers !
Je soupire : tant d’individualisme dans ce cortège d’idées.

 

Juillet, août… Moi, moi, moi, tout tourne autour de moi !
Cette nouvelle année ne sera-t-elle faite que de ça ?

 

Je me lève, je m’étire, éteins la télé et l’ordi.
Tout au fond de ma poche, mon téléphone frémit :
Quelques souhaits de bonheur ont traversé la France,
« Que ton année soit belle, je t’embrasse à distance ».

Je pense à nous, disséminés aux quatre coins du pays,
Études, boulot, Covid, retraite… En un seul mot, la vie…
Plutôt qu’une pensée, un texto, un « à bientôt » sans foi,
Sauter dans un train, et, à peine plus tard, se serrer dans les bras.

 

Septembre, octobre… Parents, enfants, famille, amis,
Une année faite de nous ne serait-elle pas plus jolie ?

 

Je rempoche l’appareil et regarde l’horizon.
Au loin un bateau passe captant mon attention.
Je pense à ceux qui errent en mer, ne sachant où aller,
Ayant soif d’une patrie, d’un peu de sécurité.

Je pense à ce vieil homme assis là, dans la rue,
À ses habits troués et à sa main tendue.
Une voix murmure alors, venue de l’au-delà :
« Aujourd’hui on n’a plus le droit, ni d’avoir faim ni d’avoir froid »[i].

 

Novembre, décembre… Douze mois pour eux, solidaires et unis,
N’est-ce pas cette année-là qui fait le plus envie ?

 

Défilent dans ma tête des malades sans traitement,
Des victimes de guerre, d’abus, de harcèlement.
Certes, changer le monde n’est pas en mon pouvoir,
Mais un colibri dit un jour : chacun peut faire sa part[ii].

Je sais pas faire grand-chose mais je peux commencer,
Déjà écrire ces mots pour souhaiter « Bonne année »,
Puis sortir et offrir, cessons de cogiter,
Un sourire, une main, du temps pour écouter.

 

Automne, hiver, printemps, été
Et vous, vous allez en faire quoi de cette nouvelle année ?

 

 

Illustration des saisons avec des arbres représentant le printemps, l'été, l'automne et l'hiver.

[i] Extrait de La Chanson des Restos, écrite et composée par Jean-Jacques Goldman en 1986, interprétée par Les Enfoirés. Découvrez et soutenez leur action sur le site officiel des Restos du Cœur.

[ii] La légende du colibri est une histoire inspirante sur le courage et la solidarité qui a notamment inspiré Pierre Rabhi lors de la création du mouvement Colibris. Découvrez-en davantage en lisant mon adaptation de la légende, ainsi que sur le site du Mouvement Colibris.

 

 

© Copyright Isabelle Anne Roche – 2025 – Tous droits réservés
Le texte de cet article est la propriété de son auteur et ne peut être utilisé sans son accord et sous certaines conditions.

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