Ce soir j’ai rendez-vous avec mon coach

La Défense. Je sors du boulot. Je rentre la tête dans les épaules, le vent souffle sur le parvis. Je m’insère dans la foule qui avance d’un pas pressé vers le RER, contournant de temps en temps quelque touriste qui immortalise un élément d’architecture ou s’émerveille devant la, il faut dire bien belle, perspective sur Paris. J’ai l’impression de pencher en avant, et pas seulement sous l’effet du vent. Cette vie me pèse. Toutes ces réunions, jour après jour. Pour quoi ? Des discussions à n’en plus finir, des guerres de territoire, des présentations auxquelles je n’arrive pas à m’intéresser. Et pendant ce temps-là les mails qui s’entassent. Seize ans que je suis dans cette boîte. Seize ans que je fais ce trajet chaque matin et chaque soir. Seize ans que mon intérêt s’effrite jour après jour. Heureusement qu’il y a les collègues, je connais du monde maintenant, ils amènent un peu de chaleur humaine à mes journées entre ces parois de verre et d’acier. Enfin, pas bien sûre que ce soit de l’acier.

Ça fait un moment que je pense à changer de vie. Complètement ou en partie, je ne sais pas trop. Mais au moins consacrer une partie de mon temps à faire quelque chose qui m’intéresse. Quelque chose d’utile aussi. Parce que là, franchement, ce que je fais ne sert pas à grand-chose. L’entreprise est si grande. Et puis les résultats ont beau être plutôt bons, ça ne suffit jamais. Chaque année voit fleurir un nouveau plan d’économies. Pour quoi ? Satisfaire les actionnaires. C’est la loi du milieu, mais ça ne fait rien vibrer en moi. J’ai vu un magazine qui parlait de ça. Le brown-out je crois qu’ils appellent ça. La perte de sens. Brown. Parce qu’on est dans le noir ? Enfin dans le marron plutôt. Bon, je ne vais pas extrapoler là-dessus…

Quand je réfléchis à ce que j’aurais pu faire de différent, il y a comme un regret qui plane. Écrire. J’aurais aimé écrire. Souvent on m’a dit que je devrais. Je me souviens d’un article que j’avais écrit lors du décès du vieux curé de la commune, le Père Renoult. Pour le journal local. Bon, je l’ai envoyé trop tard, il n’a jamais été publié. Mais je me souviens du plaisir que j’ai pris à aligner les mots dans une chambre d’hôtel minuscule pendant les vacances d’hiver. Et je me souviens des larmes du prêtre remplaçant quand il a lu. Au boulot aussi, je prenais un grand plaisir à rédiger des notes de service, à tourner les phrases, les mots, à envisager la façon dont le message pouvait être reçu. Mais je vous parle d’un temps… Une note de service, ça n’existe plus, ça ! Et pourtant l’écrit n’est pas mort, loin de là ! Je suis fascinée par ces conversations : « tiens, tu pourrais me donner telle info sur machin-truc ? », « pas de souci, tu me fais un mail pour me le demander ». Mais nom de d’là, je viens de te le demander, là ! J’aimais bien écrire les discours aussi. Oh, pas politiques, ceux pour les pots de départ, pour fêter quelqu’un, lui rendre hommage. Des trucs à la fois drôles, émouvants et synthétiques pour ne pas perdre l’auditoire en route. Bref, en marchant là dans le vent, je pense à ça et à ce regret. Est-ce que cela doit rester un regret ? Ce serait peut-être pas mal d’en faire un projet…

Le métro ralentit, on y est. Je descends. Ce soir je vais voir mon coach. Il va m’aider à y voir plus clair dans tout ça. Troisième étage. Je retrouve le lieu familier. Je me sens bien ici, en confiance. Je vais prendre un peu de temps pour moi. On va travailler sur ce que je veux vraiment.

Cheminer vers mon objectif  avec les niveaux logiques

L’objectif que je voudrais atteindre ? Consacrer du temps à l’écriture. Écrire quoi ? Des choses qui pourraient aider les autres. Pas l’humanité toute entière, mais quelques personnes qui pourraient se retrouver dans mes mots, être touchées, y puiser des idées, une force, un espoir, l’ébauche d’un chemin, ou simplement passer un moment hors du temps, s’immerger dans un monde différent, un peu mieux se comprendre, comprendre les autres, trouver un peu de paix et ouvrir leur cœur au partage. Quelque chose comme ça.

Là, par terre, dans la pièce blanche et claire, six papiers sont posés devant moi, les uns derrière les autres, comme une échelle menant vers l’avenir. Sept mots. Ah, je sens que je vous ai eus ! Sept, pas six : environnement, comportements, capacités, valeurs et croyances, identité, vision. Je me laisse guider par la voix du coach. Pas après pas, je me déplace de papier en papier.

Un pas. Environnement. Où et avec qui je suis quand j’écris ?

Je suis chez moi, devant mon ordinateur. Plus précisément ? Dans la chambre peinte en bleu. Pas en bas, trop de tentations, le frigo, la télé, la radio, les placards de la cuisine, le courrier qui traine… En haut. Assise sur le canapé bleu dans la chambre peinte en bleu. Avec une table à roulette sur laquelle est posé mon Mac Book Air. Air. Léger. Je regarde le ciel par le Vélux. Un ciel bleu clair, quelques nuages blancs. De temps en temps un oiseau passe. Le silence. Je suis seule. Les enfants sont à l’école ou alors au lit. J’aime ce calme, mes idées peuvent se dérouler, se délier, évoluer, prendre forme, tourbillonner jusqu’à ce que mes doigts les traduisent sur le clavier. Enfin, si j’arrive à résister à changer de fenêtre, celle de l’ordi, pas celle ouverte sur le ciel, pour faire une partie de Candy Crush Saga. C’est pas long une partie. Trois minutes. Et seulement cinq vies. Non, non, je ne triche jamais, je ne modifie pas la date système pour vivre plus longtemps. On ne triche pas avec la mort, même celle sucrée et colorée de Candy Crush. Il fait bon dans la chambre peinte en bleu. Je regarde le piano. Muet depuis bien longtemps. Je regarde mes doigts sur le clavier du Mac. Puissent-ils faire jaillir des mélodies de mots aussi douces que le piano. Une tasse de thé fume à côté de moi. Jardin vert de Dammann Frères. Mon préféré. Quand sommes-nous ? A la fin du printemps. Le printemps prochain. Les arbres sont couverts de feuilles, le forsythia n’est plus jaune depuis un moment déjà, les grandes roues de la foire du trône ont été démontées, les lapins de Pâques en chocolat ont été croqués, les hirondelles sillonnent le ciel à une allure endiablée.

Un pas. Comportements. Qu’est-ce que je fais quand j’écris ?

Je pianote sur le clavier. Celui de l’ordi. De temps en temps je regarde le ciel par la fenêtre. Une idée vient. Je dois vérifier quelque chose. J’ouvre une autre fenêtre sur le Mac, Google, quelques mots, une réponse. Je reprends. Je saisis un livre à côté de moi. Je lis quelques phrases, en prends un autre. Les mots se forment dans ma tête, s’échappent. Un morceau de chocolat. Oui, voilà ce qu’il me faut, un morceau de chocolat. Les mots fuient. Le téléphone émet un tintement. Un message. Je regarde. Les soldes chez Monoprix. D’accord. Je verrai. Peut-être qu’il y a des choses intéressantes ? Je dois me concentrer. Je regarde autour de moi. Je n’avance pas. Attends, coach. Quelque chose ne va pas. J’efface tout ce que je viens de dire, je recommence.

Je rentre dans la pièce. Je mets mon téléphone en mode avion et le pose près de la porte. J’entrouvre une fenêtre, l’air doux et le chant des oiseaux entrent dans la maison. Je m’assieds. Le dos droit. Les pieds ancrés dans le sol. J’imagine comme un fil qui me tire vers le haut, je me connecte au ciel. La terre, le ciel. Je ressens mon centre, là, juste au-dessus de l’estomac. Je respire doucement. Je pense aux yeux de Robert Dilts. Vous ne connaissez pas Robert ? Puissiez-vous un jour croiser son chemin. Ailleurs que via Google. Ses yeux si bienveillants, si doux, comme cette brise de printemps. J’étends cette connexion autour de moi. Je suis connectée au champ. Les mots qui coulent de mes doigts viennent de là, du champ, de ce tout auquel nous sommes tous connectés, tout est fluide quand ce canal est ouvert. Je pianote sur le clavier. Je respire doucement. Je regarde le ciel et souris aux oiseaux.

Un pas. Capacités. Desquelles ai-je besoin pour écrire ?

Déjà cette capacité de centrage. Je sais comment faire. Les pieds dans le sol, la ligne qui monte vers le ciel, ce fil qui tire vers le haut, l’ouverture au champ, à ce qui entoure. Je le fais souvent sur la plage d’Hendaye, en vacances. Le soir, quand le soleil commence à descendre derrière le Jaizquibel et que le sable se teinte de tons orangés. Face à l’océan. Légèrement tournée en direction de Biarritz pour ne pas voir les immeubles qui défigurent la côte espagnole. Plein nord. Et oui, bizarrement cette plage du sud est orientée au nord. Hendaye, la plage parfaite. De l’espace, même en plein mois d’août, le sable le plus fin qu’on puisse trouver sous nos tropiques, l’océan devant, les montagnes derrière, encore quelques jolies villas sur le boulevard de la mer. Hendaye. Mon enfance. Ma plage de cœur. Là, à la lisière des vagues, debout, dans le vent léger, connectée. La terre, le ciel, le monde. Respiration paisible.

Ensuite la capacité d’écrire. En fait c’est la même chose. Je crois que c’est Mozart qui disait que la musique lui venait comme ça, d’ailleurs, et qu’il ne faisait que transcrire sur le papier ce qu’il entendait. Et Socrate qui disait qu’il avait un petit être magique qui lui soufflait sa sagesse. Un daïmos. Un démon. Un mot dont le sens a beaucoup évolué. Si, si, j’ai lu ça dans Happinez. Vous connaissez ce magazine ? Une vraie source de bien-être… Je ressens l’écriture comme ça. Comme si les mots, les histoires existaient quelque part, comme une sorte de nappe phréatique de mots assemblés, et qu’il fallait juste s’y connecter, ouvrir un canal pour que les mots descendent vers les doigts et finissent sur la page virtuelle de Word. Donc en fait, la capacité qu’il me faut mettre en œuvre, c’est avant tout celle d’ouvrir le canal. Par le centrage. Celle de taper sur le clavier aussi, bien sûr, mais ça c’est devenu quasiment automatique.

Une autre capacité qui entre en jeu ? Celle de rester concentrée. Pas le plus facile pour moi. Pour ce faire, je dois éloigner les sources de distraction. Le téléphone, la nourriture, le thé. Le plus difficile c’est de tenir à distance les tentations qui sont sur l’ordinateur même. Les jeux. La messagerie. Comment faire ? En fait, c’est tout bête, je n’y avais jamais pensé, mais si je coupe le Wifi, plus de messages et plus de jeux connectés. Comme je n’ai pas d’autres jeux, ça devrait fonctionner.

Autre chose ? La connaissance du sujet sur lequel j’écris. Je pense à Romain Sardou et à ses fabuleux romans historiques. Combien de temps a-t-il passé à préparer chaque nouvelle œuvre ? Des heures, des jours, des mois à étudier le contexte historique, les faits mais aussi les habitudes des gens de l’époque, leur environnement, leurs modes de vie, de pensée. Colossal. Pour un résultat magnifique. Suis-je capable de ça ? Je veux dire de consacrer autant de temps à l’étude d’un sujet. Peut-être pas. Pas sans être rassurée sur le résultat. En revanche, je peux peut-être prendre le truc à l’envers et commencer par écrire sur des choses que je connais. Des choses sur lesquelles je pourrais compléter mes connaissances mais ne pas partir de rien. Sur ce qui a occupé mes dernières années. Le développement personnel. La psychologie. L’ouverture aux autres. Oui, commencer par ça. J’ai lu à plusieurs reprises que quand on était, ou qu’on voulait être, un professionnel de l’écriture l’important était d’écrire chaque jour. Quelque chose. N’importe quoi. Oui, je dois avoir cette capacité-là.

Un pas. Croyances / Valeurs. Quelle valeur écrire satisfait-il ?

Pourquoi j’écris ? Ou plutôt pour quoi ? Je me souviens avoir fait un exercice permettant de hiérarchiser ses propres valeurs. L’honnêteté en premier. Puis le courage. Ensuite transmettre, aider et partager. Voilà ce que j’avais noté. Que voudrais-je satisfaire en écrivant ? Je dirais surtout aider. C’est ça qui m’importe. Je garde quelque part dans ma boîte à petites pierres précieuses au chaud dans un coin de mon cœur les mots de Francis, un de mes éminents enseignants, qui après avoir lu quelques pages de mon cru m’a confié : « tu aides les gens en faisant ça ». Ses mots ont cheminé. S’il est possible d’aider avec des mots, pourquoi s’en priver ? Mais j’entends d’autres voix. Une qui dit que ce n’est que moi que je cherche à aider. Parce qu’on entend si souvent des personnes dire qu’écrire a été une thérapie pour elles. Remarquez, ça ne serait pas si mal de m’aider moi-même, ça ferait déjà une personne. Mais ce n’est pas ça qui me motive. Je ne crois pas. C’est vraiment apporter quelque chose à celui qui lit.

Une autre voix s’élève et dit « Tout le monde veut écrire ». Encore une autre : « C’est à la mode ». Une troisième : « Surtout sur le développement personnel, c’est facile ». Mmmm. C’est vrai, je suis d’une banalité confondante. Quelle prétention de penser que je pourrais apporter quelque chose à quelqu’un.

Et puis je pense à quelques livres qui m’ont profondément marquée : « L’alchimiste » et « La cinquième montagne » de Paolo Coelho, « Jonathan Livingston le goéland », « Le petit prince », « Mange, prie, aime » d’Elizabeth Gilbert, « La citadelle des neiges » de Matthieu Ricard, le magnifique « Méditer jour après jour » de Christophe André et tous ceux de Laurent Gounelle. Les lire a été à chaque fois un grand moment de bonheur, mais ça va au-delà. Tous ces mots m’accompagnent. Ils m’ont vraiment aidée je crois. Aidée à voir plus loin, à tracer une voie, à apaiser mes tourments, et profiter de l’instant, à trouver de la quiétude. Tant de bénéfices. « Oui, mais ce sont des maîtres, ces auteurs, tu ne peux tout de même pas te comparer ». Je crois bien que cette voix qui parle dans ma tête est la mienne. Le doute, toujours le doute. La dévalorisation permanente. Cette croyance que se mettre en avant c’est mal.

Je repense aux petits campagnols qui apparaissent dans les pages de cette sublime BD « Le jour où le bus est reparti sans elle ». Trois petits campagnols qui voulaient atteindre une île au milieu d’un lac. Trois petits campagnols qui se jettent à l’eau pour atteindre leur but. Et les voix des autres animaux, leurs amis, qui s’élèvent. « Un campagnol ne peut pas nager ! ». « C’est trop dangereux ! ». « Vous êtes trop petits ! ». « Vous allez tomber malades ! ». « Vous n’irez pas loin ». Et très vite deux campagnols reviennent sur le rivage. Et le troisième continue, continue. Il atteint l’île, en explore chaque recoin, fait des découvertes, admire de belles choses, profite. Puis il se met à l’eau de nouveau et rejoint ses amis sur la rive du grand lac. Ses amis lui parlent « comment as-tu fait ? ».  « C’est incroyable ! ». « C’est insensé ». Et le petit campagnol enlève alors ses bouchons d’oreille et s’exclame « quoi, qu’est-ce que vous dites ? ». Toutes ces voix négatives, la mienne, celle des autres, m’empêchent d’avancer, d’essayer, et qui sait, on n’est jamais à l’abri de réussir… Je pique donc les bouchons d’oreille du petit campagnol. Et je reprends.

La valeur que je cherche à satisfaire en écrivant : aider les autres. Mais aussi partager et transmettre. J’ai eu la chance de faire des formations, d’assister à des conférences, de lire des livres remplis de tant de richesses que j’ai envie de livrer ce que j’en ai compris et retenu, pour que d’autres puissent découvrir ces univers, avoir envie de s’intéresser à ce monde, ces mondes plutôt, du développement personnel.

Il y a quelques jours, je suis allée avec une amie à une méditation de groupe. Quand j’ai découvert la méditation de pleine conscience, je n’osais pas trop en parler, toujours la peur de paraître ci ou ça, ou simplement de ne pas intéresser. Mais maintenant, je suis heureuse d’avoir pu amener plusieurs de mes amies à découvrir cette pratique et ces enseignements, et encore plus de les voir aller au-delà. Ça m’a particulièrement touchée de voir l’une d’entre elle aller à la rencontre de méditants qu’elle croisait depuis des années marchant lentement dans la rue et qu’elle regardait étrangement, et découvrir une communauté formidable de moniales vivant à deux pas de chez elle.

Donc aider, partager, transmettre. Avec honnêteté. Transmettre un message sincère, pas un message dicté par l’envie d’être connue, reconnue, de cadrer avec les codes de la société actuelle. Juste livrer mes découvertes, mes ressentis, mes émotions. Pour cela peut-être faut-il un peu de courage. Au moins celui de croire avec force que cela peut être utile, que j’ai le droit de le faire si j’en ai envie. Celui d’oser mettre de temps en temps des bouchons dans mes oreilles sans me dire qu’en me coupant ainsi du monde, en risquant de rater la demande de quelqu’un, de rater une occasion d’aider, d’être moins disponible, je fais quelque chose de mal, parce que l’essentiel, c’est la disponibilité et l’écoute du cœur et ce ne sont pas ces petits bouchons de rien qui pourront empêcher les messages d’arriver jusque-là.

Un pas. Identité. Qui suis-je quand j’écris ?

Je me sens comme quelqu’un qui accompagne. Qui tend la main sur le côté, et qui prend doucement la main de son voisin pour l’inviter à faire un petit bout de chemin ensemble. Je me sens comme une petite lumière qui tremblote dans le champ de vision de cette personne. Pas devant, pas derrière, sur le côté, une présence. Une présence qu’elle peut occulter si elle porte son attention sur autre chose, mais qu’elle peut toujours retrouver en élargissant son champ de vision, son champ de conscience. Je sens sur mes épaules un châle chaud, réconfortant, et si j’étends mon bras, je peux englober l’autre dans ce châle, l’accueillir, partager sa chaleur et sa douceur. Je suis un compagnon. Un compagnon discret et bienveillant. Les mots que j’écris coulent comme un petit ruisseau léger, qui saute sur les cailloux de l’existence en produisant des clapotis joyeux, qui danse dans la lumière et se dirige vers mon compagnon de route, lui envoie de sa légèreté, un peu de sa folie, sa chanson guillerette pour l’aider à faire fleurir les pensées positives. Vous avez lu ça ? Il suffirait d’avoir 2,9 pensées positives pour un pensée négative pour aller mieux[1]. Oui, c’est ça, je suis un compagnon de route qui insuffle l’espoir, qui aide le chemin à s’éclaircir, la voie à se tracer. Une petite lumière dansante, un ruisseau joyeux, un châle douillet, une main rassurante, un vent léger qui écarte doucement ce qui masque le chemin…

Quelle est ma mission ? Faire ma part pour semer un peu de positif sur la terre. Comme le colibri de Pierre Rabhi. Vous connaissez ce colibri ? Ce petit colibri qui veut éteindre un feu de forêt en amenant sans faiblir, avec son petit bec, goutte après goutte de l’eau sur le foyer. Je le vois qui volette au-dessus du ruisseau, il fait sa part. Je veux faire la mienne. Que dit ce proverbe déjà ? « Il pousse plus de choses dans un jardin que n’en sème le jardinier ». Alors semons. Nous récolterons beaucoup, et aurons de belles surprises. Voilà, je suis un semeur de pensées positives, un éclaireur de chemin qui, si vous prenez sa main, fera un petit bout de la route à vos côtés.

Un pas. Vision. A quel système plus large suis-je connectée quand j’écris ?

Quand je suis cette personne qui écrit, quand je suis moi, je me sens reliée au monde. Je sens mes bras légèrement écartés de mon corps et dans chaque main une autre main, une patte, une feuille, une pierre, un souffle. Et ainsi, de main en main, de patte en patte, de feuille en feuille, tout l’univers se donne la main. Je vois des sourires, je les sens plutôt, de la quiétude, comme un chant doux et harmonieux qui s’élève de cet ensemble, une vibration positive, et je fais partie de cette ronde, je suis une infime partie de ce tout. Je pourrais citer Lao Tseu ou Confucius pour parler de ce tout, mais ce qui me vient, c’est un refrain de Maître Gims, « Mais quand je la vois danser le soir, j’aimerais devenir la chaise sur laquelle elle s’assoit, ou moins que ça, un moins que rien, juste une pierre sur son chemin ». Que ce soit cette pierre sur le chemin, l’ombre de l’ombre, l’ombre de la main, l’ombre du chien de celle qui veut quitter le grand Jacques ou le colibri de Pierre Rabhi, chacun a sa place, chacun participe à ce tout harmonieux, dans la joie, le respect et la bienveillance. Une image se forme devant mes yeux. C’est une photo. Une photo prise par Matthieu Ricard. Un moine de dos, méditant face au glacier Jomolhari au Bhoutan. Non, je ne vais pas la coller là. Un petit tour sur votre moteur de recherche préféré, je vous offre une excuse pour surfer, faut en profiter ! Et revenir… Se perdre dans l’image… Une harmonie parfaite, une immensité majestueuse, et la vie que l’on sent dans chaque recoin de l’image sans la voir. Je laisse vibrer cette image devant mes yeux. Plénitude…

Conclusion

Je me sens bien, complète, alignée. Demi-tour. Je regarde le chemin parcouru et redescends un à un les niveaux qui m’ont menée jusqu’à ce lieu d’accomplissement. Identité. Valeurs. Capacités. Comportement. Environnement. Me revoilà dans la chambre bleue, appuyée sur un coussin bleu, à regarder le ciel… plutôt gris, il faut bien le dire. C’est gentil la licence poétique, mais si c’est gris, c’est gris ! Un pas encore et revoilà la salle blanche et claire. Enfin, moins claire, il fait presque nuit maintenant. Je retrouve la rue, les sons de la ville, les arbres aux pieds encagés. L’air n’est-il pas un peu plus léger ? Je souris aux gens que je croise, je sens les freesias que le fleuriste remballe et je marche. Je sais où je vais. Je sais ce que je vais faire. Je sais pourquoi, pour quoi. C’est ce que je veux. Je fais tourner la clé dans la serrure de ma maison, je pose mon manteau et monte tranquillement l’escalier. Et j’ouvre la porte de la chambre bleue…

 

[1] Ch. André, Th. d’Ansembourg, M. Ricard et al. – « Psychologie positive – le bonheur dans tous ses états » – Ed. Jouvence – 2011

 

© Copyright Isabelle Roche – 2017 – Tous droits réservés
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